Un seul être vous manque


Partie 1

Cody revenait de course. Trois jours de chevauchée intense, il était exténué Il arrêta sa monture devant le relais de la diligence. Elle venait tout juste d’arriver. Curieux, il regarda les passagers en descendre. Une dame avec son petit garçon, un couple âgé et soudain, il fut captivé par une jeune fille qui posait le pied sur la route poussiéreuse. Il la suivit du regard. Blonde, yeux clairs, de longs cheveux qui tombaient dans son dos. Un ange venu du ciel ! Elle semblait être seule. Cody se sourit à lui-même. Elle était très jolie, et semblait perdue. Deux raisons qui le forçait à lui porter assistance. Il mit sa fatigue de côté, secoua vivement ses vêtements et son chapeau couverts de poussière et s’approcha d’elle ;
- Bonjour, Mademoiselle, William F.Cody, puis-je vous aider ?
Elle se tourna vers lui et lui dédia un gracieux sourire ; alors, il fut subjugué ; ses yeux, son visage, son sourire, tout le ravissait…
- Bonjour. En effet, vous pouvez m’aider. Je cherche un endroit où passer la nuit. Connaîtriez-vous un hôtel ?
Il sourit ;
- Et comment ? Je vais vous y mener, si vous le souhaitez !
- Avec plaisir, Mr Cody.
- Appelez-moi William, mademoiselle… ?
- Sara.
- Enchanté, Sara.
Cody lui tendit le bras et la mena jusqu’à l’hôtel. Il lui porta ses bagages jusqu’à sa chambre. Elle le remercia d’un sourire. Mais avant de la quitter, Cody, se disant qu’il ne la reverrait sûrement plus de sa vie, fut pris d’un excès de zèle et demanda ;
- Accepteriez-vous de dîner avec moi, ce soir ?
Elle lui sourit ;
- Mais nous ne nous connaissons pas !
Cody acquiesça ;
- Il est vrai que nous venons juste de nous rencontrer, et vous jugerez sûrement ma demande un peu cavalière, mais… je ne suis ni un tueur, ni un hors-la-loi, et je serais vraiment ravi de dîner avec vous !
La jeune fille sembla sensible au charme de Cody ;
- Alors, ce sera avec grand plaisir, William.
- Alors, à ce soir, je viendrai vous chercher.
- A ce soir.
Et Cody quitta l’hôtel, rejoignit sa monture et galopa vers le relais heureux d’avoir fait cette rencontre. Si tous ses retours de course pouvaient être aussi merveilleux, Teaspoon serait bluffé de sa bonne volonté ! Sara devait sûrement être la femme de sa vie.

Lou sortit violemment de la grange. Kid la poursuivait ;
- Lou, qu’est-ce que j’ai dit encore ?
- Si tu ne le sais pas, c’est pas moi qui te le dirais !
- Mais dis-moi ! Qu’est-ce que j’ai dit de mal ?
Elle marchait vivement, et il avait du mal à la suivre. Elle maugréa ;
- Ce n’est pas ce que tu as dit, c’est plutôt ce que tu n’as pas dit !
C’est à cet instant que Cody arriva sur sa monture en sifflotant et qu’il les salua ;
- Salut, les amoureux !
Lou fronça les sourcils ;
- Qu’est-ce qui le met de si bonne humeur ? Il rentre de course, non ?
- Oui. Il est parti il y a trois jours. Il devrait être épuisé.
- Tu le connais !!!
Kid et Lou s’échangèrent un regard. Le mystère de l’attitude de Cody leur fit oublier leur dispute et ils coururent ensemble jusqu’au dortoir où ils s’attendaient à trouver leur ami couché sur son lit. Au lieu de cela, ils le trouvèrent, sifflotant toujours, et astiquant ses bottes.
Lou donna un coup de coude à Kid pour que celui-ci sonde leur ami ;
- Ca va ?
- Ca va !
- Tu n’es pas fatigué ? demanda Lou.
- Non. Je suis en pleine forme.
Kid se rengorgea ;
- Euh… Je ne voudrais pas te paraître curieux, mais pourquoi tu astiques tes bottes ainsi. Serais-tu tombé de cheval ? Et sur la tête en plus ?
Cody leva vers ses amis des yeux rieurs ;
- Je ne serais pas de si bonne humeur, tu me vexerais. Tu sais que je suis le meilleur cavalier de la Russell, Majors et Wadell.
- Alors, explique-nous. Demanda Lou.
Cody les regarda et prit une grande inspiration ;
- Aujourd’hui, j’ai rencontré la femme de ma vie, et j’ai rendez-vous avec elle ce soir.
- Ah ! Ouais !
Kid et Lou se retenaient de rire. Cody tombait amoureux au moins deux fois par semaine.
- Oui. Je l’ai invitée à dîner au restaurant.
- Rien que ça ! s’exclama Lou. Et je peux savoir avec quoi tu vas payer, tu me dois dix dollars, et tu en dois cinq à Jimmy !
C’est là que Cody prit une mine embêtée ;
- Ben… Je comptais sur…
Lou le coupa tout de suite ;
- Ne compte pas sur moi pour te prêter de l’argent pour sortir une fille ! Je l’ai déjà fait, et il s’est révélé que ce n’était qu’une voleuse !
- Ce n’est pas pareil ! Ce n’est pas une fille ! C’est la femme de ma vie !
- Non, Cody !
- Kid ? Cody avait son regard suppliant. Kid tenta de résister ;
- Pourquoi tu ne l’invites pas faire une promenade ? Ca coûte rien !
Cody sembla scandalisé ;
- Une promenade ! Ca ne coûte rien ! Tu ne m’as pas écouté mon vieux ! C’est la femme de ma vie ! Elle est belle comme le jour, douce, elle a les yeux aussi clairs que l’eau des fontaines, et elle me donne des frissons lorsqu’elle dit mon nom. William, William. Lorsqu’elle le dit, ça prend un autre sens, comme si j’étais un roi, ou quelqu’un de très important ! Pour elle, je donnerais toute ma fortune, ma chemise et je marcherais pieds nus,… Quand tu rencontres une femme comme elle, tu ne peux pas te dire qu’une promenade lui suffira. Si c’est comme ça que tu raisonnes, je plains Lou.
Kid se trouva entre le rire et la culpabilité. Il tira quelques pièces de sa poche, et les donna à son ami ; qui les empocha en souriant ; Kid ne put s’empêcher de dire ;
- A ce train-là, c’est moi qui vais marcher pieds nus bientôt !
- Dieu te le rendra. Bon, je vais demander à Rachel si elle peut me repasser ma chemise !
Et il les abandonna. Kid se tourna vers Lou qui s’était appuyée contre la paroi de la porte. Elle le regardait en coin ; Kid se sentit agressé ;
- Quoi ?
Elle se redressa. Ses yeux étaient devenus sévères ; elle dit ;
- Alors, tout ce qui compte pour toi, c’est que cela ne coûte rien ! Je vois…
Et elle quitta la pièce commune. Kid la poursuivit ;
- Mais qu’est-ce que j’ai dit encore ?

Buck galopait sur le chemin. Il sortait la jument qu’il venait de dresser. Soudain, il vit un cavalier. Ou plutôt une cavalière. Une longue chevelure blonde s’ébattait sur ses épaules. Elle lui faisait signe. Il s’arrêta à sa hauteur et fut frappé par la clarté du regard de la jeune fille et la douceur de sa voix ;
- Bonjour ! Excusez-moi, mais je crois que mon cheval s’est fait mal !
Buck descendit de cheval et sans quitter la jeune fille du regard s’approcha de l’animal.
- Il a heurté une pierre. L’informa-t-elle.
Buck palpa les membres de l’animal, et confirma ;
- Oui. Il s’est fait mal. Ce n’est pas grave, mais il faudra le laisser se reposer quelque jours !
Buck détacha son foulard et en fit un garrot sur le membre.
- Comment je vais faire ?
- Où alliez-vous ?
- Je retournais en ville. Je suis à l’hôtel.
- Je peux vous y emmener.
- Cela ne vous dérange pas ? demanda-t-elle.
- Bien sûr que non.
Il monta sur son cheval et lui tendit la main pour la hisser derrière lui. Et ainsi escorté, il rejoignit la ville. Quand il l’aida à descendre de sa monture, elle le remercia ;
- Merci à vous, c’était vraiment gentil !
Il eut un sourire gêné ;
- C’est normal.
- Je ne connais même pas votre nom.
- Buck Cross.
- Merci Buck.
Et elle disparut dans l’hôtel. Buck se rendit alors compte qu’il ne savait même pas comment elle s’appelait. Elle lui avait remué le cœur de ses yeux clairs, et il ne savait pas son nom.

Une bonne odeur de ragoût flottait dans la maison. Tous étaient attablés devant leurs assiettes fumantes, mais aucun d’entre eux n’y avait touché. Ils attendaient avec impatience l’entrée majestueuse de Cody , qui devait se rendre à son rendez-vous. Et cela ne se fit pas attendre. Il entra, botté de cuir, chemise blanche immaculée, cheveux tirés en arrière, et bombait le torse. Lou ne put s’empêcher d’émettre un petit sifflement. Cody soupira ;
- Allez-y, moquez-vous ! Je vous laisse cinq minutes pour le faire, pas une de plus !
Alors, les quolibets fusèrent ; Et Teaspoon commença ;
- Te voilà beau comme un chariot tout neuf ! Je crois que tu n’as jamais été si propre depuis que tu es venu au monde !
Buck s’approcha ;
- Mais tu t’es parfumé ! Tu vas l’asphyxier !
Ike fit quelques signes. Buck continua ;
- Tu as raison, si avec tout ça, tu ne l’épouses pas, ce sera à désespérer de ton capital séduction !
Lou s’y mit ;
- Cessez de vous moquer! Moi, je vous parle en tant que femme, et en tant que femme… Je suis contente de me faire passer pour un homme pour ne pas avoir à donner mon avis !
- Dommage que Jimmy ne soit pas là pour voir ça !
Cody coupa ;
- Moi, je suis très content qu’il ne rentre que demain. Je n’aurai pas à subir ses remarques en plus des vôtres. A savoir qu’elles ne me touchent aucunement ! Sincèrement, Rachel, comment vous me trouvez ?
Toutes les têtes se tournèrent vers Rachel. Elle s’avança un peu et sourit ;
- Tu veux vraiment que je réponde à cette question ?
Les autres éclatèrent de rire. Cody leva les yeux au ciel ;
- Si vous vous mettez de leur côté, maintenant, où va le monde ? Et toi, Kid, tu ne dis rien ?
Kid secoua la tête ;
- Je préfère pas. Quand je vois où passe l’argent que je t’ai prêté, j’aurais préféré ne jamais te connaître.
Buck éclata de rire. Cody coupa ;
- Bon, chacun a dit ce qu’il avait à dire. Maintenant, excusez-moi de vous fausser compagnie mais je vais rejoindre quelqu’un qui saura apprécier à sa juste valeur mes qualités !
Il allait partir, quand Rachel le rappela ;
- Un mot encore !
Il se retourna, blasé ;
- Quoi ?
Rachel lui sourit ;
- Je suis sûre qu’avec tous les efforts que tu fais, elle y sera sensible ! Bonne soirée !
- Merci Rachel. Bonsoir, vous autres !
Ils répondirent en chœur ;
- Bonsoir William !
Et la porte se referma laissant flotter l’effluve du parfum. Ils se mirent à manger. Ike fit un geste. Lou approuva ;
- Moi aussi, je donnerais cher pour voir à quoi elle ressemble !
Ike continua, mais Teaspoon le coupa ;
- Je t’arrête ! Je vous arrête tous ! Moi aussi, j’ai envie de savoir qui est cette merveille qu’il nous cache, mais ceci fait partie de l’intimité de notre ami, et il est hors de question que l’un de vous aille les espionner ! Si c’est réellement la femme de sa vie, il nous la présentera le moment venu !
- Autant dire jamais ! lança Kid.
Teaspoon lui lança un regard mauvais ;
- Si j’étais toi, je m’occuperais de mes affaires, avant de fourrer mon nez dans celles des autres !
Kid et Lou baissèrent les yeux ; mais Buck se mit à glousser ; Teaspoon se tourna vers lui ;
- Ca te fait rire, toi ! Dis-toi que mon avertissement vaut pour toi aussi, que je ne te prenne pas à les pister pour te moquer !
Teaspoon sentit que Ike faisait des signes derrière son dos ;
- Qu’est-ce que tu dis, toi ?
Buck traduisit ;
- Il dit que si Jimmy était là, il vous dirait que vous êtes un sacré rabat-joie !
- Eh ! Bien ! il n’est pas là, et j’en suis heureux pour ce pauvre Cody. Et je me dois d’être rabat-joie avec des inconscients comme vous !
- Avouez que vous mourrez d’envie de savoir qui est cette fille ?
- Je t’en pose des questions, Lou ? Mange !
Rachel s’approcha alors du vieil homme ;
- Vous en crevez d’envie de savoir qui c’est. Comme nous tous. N’est-ce pas ?
- Oui, mais avec l’âge, j’ai acquis la patience d’attendre, moi ! Et j’attendrai que notre ami veuille bien nous présenter la demoiselle. Et j’ai dans l’idée, et par expérience, que cela n’arrivera pas de sitôt ! Il n’arrivera pas à la retenir assez longtemps !
- C’est ce que je disais ! conclut Kid.
- Mange !

Cody était assis face à Sara. Elle avait revêtu une robe vert pâle qui faisait ressortir le rose de ses joues, et le bleu de ses yeux resplendissait. Cody ne put s’empêcher de témoigner son admiration ;
- Vous êtes ravissante !
Elle rit ;
- Merci. Vous n’êtes pas mal non plus !
- Qu’est-ce qu’une jolie femme comme vous fait dans le coin. Seule qui plus est ? Ne me dites pas que vous allez rejoindre votre mari, j’en aurai le cœur brisé !
- Non, William, je ne suis pas mariée. Je suis ici car…
Elle hésitait, puis continua ;
- Je suis à la recherche de quelqu’un… ou plutôt de quelque chose !
- Je peux savoir quoi ? Si je peux vous aider dans vos recherches ?
Elle sourit ;
- Merci, William. Je trouverai ce que je cherche seule, et si ce n’est pas ici, alors je continuerai ma route.
- Vous venez de loin ?
- Du Michigan.
- Vous comptez rester longtemps ?
- Je ne sais pas encore.
- J’aimerais que vous restiez !
Elle rit ;
- On peut dire que vous n’y allez pas par quatre chemins ! Je vous apprécie, William, mais je crois qu’il est un peu tôt pour vous dire que vous avez le pouvoir de me retenir !
Cody ouvrit de grands yeux, puis la bouche et bafouilla ;
- Ce n’est pas ce que je voulais dire… Je voulais dire… Je suis heureux de vous avoir rencontrée, et que...
- Ne vous justifiez pas. J’ai bien compris. Moi aussi, je suis heureuse de vous avoir rencontré, et je serai heureuse de vous connaître mieux… d’ailleurs que faites-vous à part porter les bagages à la sortie de la diligence ?
- Je suis un cavalier du poney express.
- C’est dangereux à ce qu’on dit !
Il prit un air modeste ;
- Quelques fois. J’ai déjà eu à découdre avec des cheyennes, un grizzli, des tueurs à gages,…
- Vous vous en êtes bien sorti à ce que je vois !
- Oui. J’ai l’habitude.
- Vous vivez à Sweetwater ?
- Oui, au relais à la sortie de la ville avec d’autres cavaliers.
Dans un élan de hardiesse, il lui prit la main ;
- Accepteriez-vous de venir dîner au relais ? Je vous présenterai mes amis !
- Ce serait avec plaisir…

Jimmy rentra à la nuit. Il attacha son cheval à l’écurie et fut surpris que les autres chevaux aient disparu. Il alla au dortoir et appela ;
- Kid, Lou, Cody ?
Il n’eut aucune réponse. Selon toute vraisemblance, la pièce était vide. S’il n’avait pas été aussi fatigué, il aurait été chez Rachel mais il abandonna l’idée et se coucha sans plus se poser de questions. Ils reviendraient bien à l’heure du petit déjeuner.

- Alors, tu vois quelque chose ? murmura Lou à Kid.
- Non. Et toi, Buck ?
Buck était perché sur un arbre qui surplombait le restaurant. Il secoua la tête ;
- Non, on est trop loin !
- Rapproche-toi ! intima Kid à Lou.
Elle s’exécuta, avança dans les fourrés qui bordaient la route et où ils s’étaient tous cachés pour pouvoir épier Cody et sa nouvelle conquête. Soudain, elle se cogna contre une masse qui se dressait devant elle. Elle entendit une grosse voix qu’elle ne connaissait que trop bien ;
- Qu’est-ce que vous faites-là ?
Kid bredouilla ;
- Euh… on... On regardait les étoiles !
- Alors, on s’intéresse aux étoiles ? Descends de là-haut, l’écureuil, et Ike sors de ta cachette. Qu’est-ce que je vous avais dit ?
Lou fronça les sourcils, et croisa les bras, ferme, et demanda à Teaspoon ;
- Et vous, qu’est-ce que vous faites-là ?
- Moi, je viens vous empêcher de commettre un crime !
- Vous y allez un peu fort ! C’est pas un crime ! protesta Buck, qui s’était laissé tomber de son arbre.
- Ah ! Oui ! Buck, as-tu déjà entendu parler de violation de la vie privée ?
- Non. Qu’est-ce que c’est ?
- Ce que vous êtes en train de faire ! Vous allez rentrer et vite car demain, une rude journée vous attend !
Ils se regardèrent et durent obéir. Le vieil homme les regarda partir ; Kid dit ;
- Vous venez pas ? qu’est-ce que vous faites ?
- Moi, j’étudie les étoiles, mon garçon !
Buck sourit ;
- Vous nous raconterez !
- Filez !

Cody raccompagnait Sara. Devant la porte de sa chambre, il s’arrêta et lui prit la main ;
- Alors, on se reverra ?
- Bien sûr, William. Merci pour cette soirée. Bonne nuit.
- Bonne nuit !
Et il lui vola un baiser.

Jimmy se redressa sur son lit et vit que ses amis étaient tous rentrés.
- Vous étiez où, tous, cette nuit ?
Cody fronça les sourcils ;
- Comment ça, il n’y avait personne quand tu es rentré ?
- Non, personne. Juste Rachel.
Kid bafouilla ;
- On a eu des choses à faire !
- Des choses très importantes !
- Qu’on ne pouvait pas faire à un autre moment !
- Qu’est-ce que vous racontez ? dit Jimmy sans comprendre.
Cody sourit ;
- Ne cherche pas Jimmy. Je parie qu’ils sont venus m’espionner. Mais il ne fallait pas vous donner cette peine…
- Pourquoi ? Elle t’a posé un lapin ?
- Non ! Mais elle vient dîner au relais ce soir. Comme ça votre curiosité malsaine sera satisfaite. Alors, vous nous avait vus ?
- Non, Teaspoon nous est tombé dessus ! Mais lui, je pense qu’il ne t’a pas manqué !
Jimmy souriait ;
- Est-ce que je comprends bien ? Cody a de nouveau fait des ravages ?
Lou approuva ;
- Cette fois, c’est la femme de sa vie ! Tu aurais dû le voir, hier soir, habillé comme un prince, et empestant le parfum.
- Tu as loupé ça, confirma Kid.
Jimmy demanda ;
- Et vous l’avez suivi ?
Ils approuvèrent . Jimmy continua ;
- Et vous vous êtes faits prendre par Teaspoon? Aucun de vous n’avez pensé à l’empêcher de quitter le relais ?
- Ben… non…
Jimmy secoua la tête ;
- Et voilà quand je suis pas là !!!!
Cody se leva ;
- Beaucoup d’efforts pour rien ! Vous la verrez ce soir ! Et là, vous pourrez dire que je suis un veinard !
- Oui, sa Majesté William.

Lou s’approcha de Buck qui regardait les chevaux dans le corral ;
- Ca va ?
Buck lui sourit ;
- Ca va.
- Tu ne parles pas beaucoup depuis que tu as débourré le cheval…
- Je pense…
- A quoi ?
- Il a de la chance Cody. Il a rencontré la femme de sa vie !
Lou sourit à son ami ;
- Tu la trouveras aussi !
Buck secoua la tête ;
- Toi, tu es avec Kid, Cody est amoureux, et moi… je me demande qui voudra de moi un jour ?
Lou s’accouda à la barrière ;
- On en est tous au même point, tu sais. Ce n’est pas rose tous les jours pour moi ! Et puis, regarde Jimmy ! Tu crois qu’il trouvera la femme de sa vie s’il continue de vivre de cette façon !
- Mais Jimmy n’est pas à moitié indien. Il attire les regards, lui !
- Mais qu’est-ce qui te prend ? Je ne t’ai jamais entendu parler ainsi !
Buck soupira ;
- J’ai rencontré une femme sur le chemin, l’autre jour. Une femme ravissante, d’une grande douceur,… je crois que si j’avais été Cody ou Jimmy, je lui aurais demandé si je pouvais la revoir…
- Qu’est-ce qui t’en a empêché ?
- Je ne suis que Buck. Un pauvre métis, cavalier fauché la moitié du temps. Je crois que je n’aurais pas supporté qu’elle me rit au nez !
- Quelque chose t’a laissé croire qu’elle le ferait ?
- Non. Au contraire. Elle était charmante ! Justement ! je l’aurais encore moins supporté de sa part !
Lou haussa les épaules ;
- Dommage ! Tu as peut-être raison ! Si tu agis toujours ainsi, alors tu finiras seul ! Tu n’as même pas le courage d’aller la voir !
- J’aimerais…
- Alors, vas-y ! Tu n’as rien à perdre. Si elle te rit au nez ou qu’elle refuse de te voir parce que tu es indien, alors elle ne valait pas la peine que tu t’intéresses à elle. Mais si tu restes dans le doute, tu pourras le regretter !
Il hocha la tête ;
- J’y penserai ! Merci.
- A ton service ! Mais je me demande ce qui est arrivé à notre ville pour qu’un détachement de jolies demoiselles s’ébattent joyeusement et vous prennent vos cœurs de durs ! Il faudra que je garde Kid à l’œil !

Tous s’étaient faits beaux pour l’arrivée de Sara. Jimmy avait même accédé à la requête de Cody et avait pris un bain. Ce qui ne servit à rien car il partit nettoyer l’écurie, ne supportant plus d’attendre leur ami sans rien faire. Les autres avaient poussé la plaisanterie au point de revêtir leurs plus beaux habits, et Rachel avait même installé ses chandeliers d’argent sur la table. Ils attendaient sur le seuil de la porte lorsque Cody arriva dans le boghey. Il secoua la tête de voir ses amis ainsi endimanchés ; Mais il devait se résoudre à l’idée qu’ils avaient fait un effort. Tous étaient attentifs à la descente de la jeune femme. Teaspoon se rengorgea et l’aida à descendre ;
- Mademoiselle, vous êtes la bienvenue ! Teaspoon Hunter pour vous servir !
Cody prit la main de Sara, et l’écarta d’un signe désapprobateur du vieil homme. Il n’oubliait pas qu’il s’était marié six fois ! Kid restait béat devant la beauté de la jeune femme, mais il se reprit vite sentant la présence de Lou à ses côtés. C’est alors qu’ils entendirent une toux. Il semblait que Buck s’étranglait ; il venait de reconnaître la jeune femme qu’il avait secouru. Sara regarda vers lui, et son visage se fendit en un large sourire ;
- Buck ! Vous ici ! Je suis ravie de vous revoir !
Cody fronça les sourcils ;
- Vous vous connaissez !
- Oui, il m’a secouru alors que mon cheval s’était blessé. Il m’a raccompagné en ville !
Cody jeta un regard mauvais à son ami. Il n’aimait pas qu’on lui fasse des cachotteries, mais encore moins qu’on marche sur ses plate-bandes ; il était hors de question que Buck s’accorde les faveurs de Sara. Cependant, le métis ne voulut pas rester de reste ;
- J’espère que votre cheval va mieux !
- Beaucoup mieux. Grâce à vous !
Cody lança alors ;
- Oui, Buck a gardé des instincts sauvages. Il communique très bien avec les animaux !
Ce qu’il voulait une attaque, se révélât bénéfique pour Buck, car Sara lui sourit ;
- Et je trouve ça très bien !
Kid s’empressa alors d’ouvrir la porte de la maison ;
- Mais entrez, je vous en prie !
- Merci.
Lou se glissa juste derrière elle, et lui passant un doigt sur la joue souffla ;
- Merci.
Ce ne fut qu’une fois attablés que Sara fit remarquer ;
- William, vous ne m’avez pas fait les présentations dans l’ordre des choses.
Il se rengorgea ;
- Oui, oui. Donc, voici Teaspoon, le marshall, Rachel, voici Kid, Lou, celui qui ne parle pas c’est Ike, et vous connaissez Buck, et… et… où est Jimmy ?
Comme s’il savait qu’on parlait de lui, Jimmy entra dans la pièce à cet instant. Aussitôt, il croisa le regard de Sara, et s’immobilisa ;
- Voici Jimmy ! présenta Cody.
Sara s’était levée, et Jimmy n’avait pas bougé. Il murmura seulement ;
- Bonsoir.
Sans répondre et sans un sourire, Sara s’approcha de lui et se tint devant lui. Jimmy baissait les yeux. La maison était devenue silencieuse. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Sans que personne ne s’y attende, Sara envoya une gifle magistrale à Jimmy, qui murmura ;
- Excusez-moi ! Et il prit la porte.
Sara retourna vers Cody ;
- Excusez-moi d’avoir gâché votre soirée, j’en suis vraiment confuse, mais pourriez-vous me ramener ?
- B… Bien sûr !
Et Sara quitta la maison. Kid s’exclama ;
- Là, j’ai pas tout compris. Si quelqu’un pouvait m’expliquer !
Rachel, sans un mot, sortit de la maison et alla à l’écurie. Elle savait qu’elle y trouverait sûrement Jimmy. Elle ne se trompait pas. Il caressait son cheval ;
- Ca va ?
Il hocha la tête.
- Tu la connais ?
Il hocha à nouveau la tête ; Rachel soupira ;
- Tu fais ce que tu veux, tu peux rester muet, mais à mon avis Cody, lui, ne te laissera pas tranquille jusqu’à ce que tu lui expliques !
- S’il veut des explications, il les lui demandera. Elle se fera un plaisir de lui répondre.
- Tu ne veux pas me dire ?
- Dire quoi ? Que je connais Sara ? Que je la connais depuis que nous sommes enfants ? Que nous avons presque grandi ensemble ? C’est ça que vous voulez savoir ? Vous voulez savoir …
- Doucement, Jimmy, ne t’énerve pas. Elle a l’air de t’en vouloir, et…
- Je l’ai abandonnée, avoua-t-il.
- Abandonnée ?
- Oui. Au moment où elle avait le plus besoin de moi, je suis parti. On s’était fait des promesses. Le genre de promesses d’enfant qu’on ne tient jamais… Je lui avais dit que je la laisserais jamais… et…
- Tu avais de bonnes raisons, je pense ?
- Si on veut!! Je ne pensais pas la revoir un jour ! Je ne voulais pas la revoir, car je savais qu’elle m’en voudrait… Et voilà… Il a fallu que Cody joue les jolis cœurs avec elle ! Laissez-moi, Rachel ! S’il vous plaît !
Rachel n’insista pas. Elle connaissait assez Jimmy pour savoir qu’il ne fallait pas aller sonder les maux de son cœur. Il viendrait à elle de lui-même. Elle le laissa seul avec ses pensées.


Suite

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