Sur la frontière


Le club des exilés

DECEMBRE 1856

Assise à sa table de travail, le porte-plume entre les dents, le menton dans les mains, Fanny regardait d’un air pensif les flocons traverser le cadre de la fenêtre, voleter à droite et à gauche, avant de s’écraser sur le rebord de pierre ou de disparaître vers l’étage inférieur. Un petit monticule cotonneux s’accumulait aux angles des carreaux embués. Le ciel était blanc, comme sa feuille. "Racontez une visite chez la modiste." Tout à fait ridicule. Comme tous les sujets de rédaction de cette sotte de miss Lowell. Celui-ci ne l’inspirait pas plus que les autres. Elle n’allait jamais chez la modiste. Il n’y avait donc rien à raconter. D’ailleurs, où était l’intérêt de parler pendant trois pages de rubans, de dentelles et de chapeaux. Il n’y avait pas de quoi s’étendre une heure sur le sujet.
"Alors, on rêve ?"
Le ton sarcastique la fit sursauter. Le porte-plume tomba, éclaboussant d’encre violette la feuille vierge. Un grand rire joyeux fusa, tandis que, étouffant un juron, Fanny tentait de réparer sa bévue à l’aide du buvard. Elle se tourna vers la porte ouverte, furieuse. Une grande jeune fille de quinze ans adossée au chambranle de la porte l’observait d’un œil rieur, visiblement satisfaite de sa plaisanterie.
"Qu'est-ce que tu veux ? grogna la fillette.
– La grosse Weather est malade. C’est moi qui distribue le courrier de ta classe."
Elle brandit de derrière son dos une enveloppe assez volumineuse salie par un long voyage. Fanny la lui arracha des mains sans un remerciement et retourna s’asseoir. La fille, les mains dans la poche de son tablier, fit quelques pas dans la chambre. Fanny allait faire sauter le cachet, mais, consciente de la présence importune, elle se ravisa et posa la lettre contre le pied de la lampe.
"Tu ne l’ouvres pas ?
– Tu es encore là ? demanda-t-elle d’un ton peu engageant, sans lever les yeux de sa feuille.
– Les autres ont raison, répondit l’intruse. C’est un plaisir de discuter avec toi… Je suis Eleonora Fallbright. Mes amis m’appellent Nora.
– Les miens m’appellent Poison. Au revoir, Eleonora Fallbright."
Loin de prendre ombrage de ce renvoi à la limite de la politesse, la jeune fille s’assit, ou plutôt, se laissa tomber sur le lit qui grinça affreusement. "Tu viens vraiment du Nouveau Mexique ?
– Et alors ?
– Je suis du Texas."
Fanny dressa une oreille intéressée. Finalement, elle se ravisa. "Ça, ça m’étonnerait. Boston n’est pas fait pour les texans. D’ailleurs, je n’ai vu personne ici qui soit de plus loin que l’Ohio.
– Parce que parmi le peu que nous sommes, je suis la seule à m’en vanter... Et comme toi, j’en paie le prix.
– Ça n’a pas l’air de t’attrister.
– Et toi, tu t’en plains ? … Il paraît que tu partages ta chambre avec cette garce de Constance Parker ?"
Fanny haussa les épaules. Comme la visite chez la modiste, ça n’avait absolument aucun intérêt. Elle prit quelques minutes pour étudier la jeune fille. Comme toutes les autres, elle portait la robe bleue des pensionnaires, qu’elle avait couverte d’un tablier blanc pour accomplir sa tâche de vaguemestre. Ses longs cheveux roux étaient nattés et relevés sur la nuque par des rubans. Ses yeux d’un bleu très pâle semblaient rire continuellement. Il y avait quelque chose d’espiègle et de provocateur dans ce regard qui ne semblait pas fait pour le trop lumineux soleil du Texas. La rondeur de son visage et ses joues roses dominant la pâleur de sa peau lui donnaient un air jovial qui la rendait sympathique. Elle se redressa et dévisagea Fanny de son air le plus sérieux. Puis, elle se pencha en avant pour murmurer, un sourire significatif au coin des lèvres : "Je peux te simplifier beaucoup de choses, ici. Je connais pas mal de trucs pour avoir la paix. Et puis, je sais comment on peut s’amuser malgré Whittle.
– Que veux-tu en échange ?" demanda Fanny, méfiante.
Eleonora éclata de rire, lui fit un clin d’œil et sortit.

Sept heures et demi venaient de sonner. Les jeunes filles descendaient en courant le grand escalier de pierre pour s’aligner dans la cour dégagée de la neige de la nuit. Leurs bottines glissaient sur les pavés luisants et verglacés, les capuchons de leurs grandes pèlerines sombres rejetés en arrière offraient leurs visages rougis à la froide morsure du vent. Vêtue comme elles, miss Whittle inspecta les rangs ordonnés en commençant par les petites, devant. Puis, la mine sévère, elle se plaça à leur hauteur pendant que ses subordonnées encadraient les autres classes, et donna l’ordre de marche vers la chapelle pour l’office de huit heures. Les jeunes filles pénétrèrent en silence dans l’imposante bâtisse en pierres rouges et vinrent remplir les bancs à droite de l’allée centrale. Ceux de gauche étaient déjà occupés par les garçons en costume gris du collège Saint George. Dans les deux petites chapelles, sur les côtés, se tenaient les familles voulant assister à l’office. L’assistance y était plutôt clairsemée, en ce deuxième dimanche de l’avent. Seules les grandes occasions remplissaient les bancs des familles. Les petites filles se placèrent sur les premiers rangs, le groupe des cadettes, auquel appartenait Fanny, s’installant derrière elles, suivi des aînées. Miss Whittle et ses assistantes firent taire les chuchotements quand le vieux pasteur entra.

Une fois de plus, Fanny n’avait rien compris au sermon du révérend Tennison. Comment pouvait-on porter un nom aussi illustre de la littérature et avoir un discours aussi hermétique ? Dommage, il était pourtant gentil. Elle regarda autour d’elle. Les pensionnaires avaient formé des petits groupes et bavardaient joyeusement malgré le froid prenant. Constance venait de rejoindre son frère et ses amis. Elle gloussait devant eux comme la dinde qu’elle était, sortant de temps à autre une main gantée de son manchon en fourrure pour étouffer son petit rire artificiel. Fanny détourna les yeux de ce spectacle affligeant et tomba nez à nez avec la texane rousse. "Je te cherchais, Poison."
Elle lui adressa un sourire espiègle qui décontenança Fanny. Puis, elle la saisit par le bras et l’entraîna en sautillant vers le parc. Elles se retrouvèrent bientôt devant un groupe de trois garçons qui saluèrent familièrement son guide. "C’est elle ? demanda l’un d’eux en sortant une cigarette fumante de derrière son dos. Elle n’a pas l’air bien méchant.
– Il ne faut pas se fier aux apparences, Charlie", répondit Nora en riant.
Le garçon, qui devait avoir quinze ou seize ans, s’adossa contre le tronc avec nonchalance et la détailla de la tête aux pieds, impassible. Les deux autres, les mains dans les poches, affichaient un air décontracté. Le plus jeune ressemblait beaucoup à celui que Nora avait appelé Charlie. Il avait le même visage fin, les mêmes yeux noisettes rapprochés, le même nez allongé, mais gardait encore les expressions d’enfant que l’aîné avait déjà abandonnées. Le troisième avait le même âge que la jeune fille, mais dépassait ses camarades d’une bonne tête. Il était si grand et maigre, qu’il semblait flotter dans son uniforme gris à la veste ouverte. Il avait de petits gestes nerveux et gauches, et changeait continuellement de position, comme s’il ne savait pas quoi faire de ses grandes jambes ni de ses longues mains. Son épaisse tignasse noire et bouclée retombait sur son col, à l’inverse de ses camarades dont les cheveux châtains étaient coupés de frais. Charlie lui passa la cigarette et se tourna vers elle : "Alors, Barthelemy. Il paraît que tu es née au Texas ?
– Qu’est-ce que ça peut bien te faire ? rétorqua Fanny, sur la défensive.
– Je te présente le Club des Texans en Exil, dit Nora en désignant les trois garçons. Voici Charles et Henry Morgan, et William Lance, mon cousin.
– Nous sommes tous texans et fiers de l’être, expliqua William. Nos pères et nos grands-pères se sont battus pour notre liberté et nous voulons leur faire honneur en portant bien haut le nom du glorieux état dont nous sommes issus...
– Pas comme les trois quarts de nos chers condisciples qui ont honte de leurs origines", conclut Charles Morgan.
Fanny laissa planer un instant de silence. De deux choses l’une. Soit ils se fichaient d’elle et ça risquait de mal se terminer, soit elle était sur le point de conclure un pacte. Le tout était de connaître leurs intentions. Il lui fallait donc avancer prudemment et tâter le terrain. Les texans sont par nature susceptibles, et ceux-là semblaient avoir hérité de leur fierté légendaire. Elle se redressa, se composa une moue désolée et dit de sa voix la plus aimable : "Navrée de vous décevoir, mais je ne connais même pas le Texas.
– Tu y es née, ça suffit, répondit William. Nora nous a raconté tes démêlées avec Whittle et les autres. Si tu veux faire partie du club, tu es la bienvenue."
Fanny n’en revenait pas. Elle ne savait pas encore si elle pouvait les considérer comme des amis, mais ils pouvaient au moins être des alliés. Elle regardait, abasourdie, la main de William Lance tendue vers elle. Nora lui asséna une violente bourrade dans le dos qui la propulsa vers cette main amicale, et scella l’alliance par un grand éclat de rire. Charlie n’avait pas bougé de son arbre. Il ne quittait pas des yeux la nouvelle recrue du club, partagé entre le contentement et la curiosité. Ce fut le seul à ne pas lui serrer la main. Il jeta son mégot par terre, l’écrasa et le recouvrit de neige. Replongeant les mains dans les poches de son pantalon, il se redressa. "A ce soir, Nora", dit-il en leur tournant le dos.
Les garçons lui emboîtèrent le pas, laissant les deux filles seules au pied de l’arbre. Fanny les regarda s’éloigner, inquiète. Elle n’aimait pas la réaction de Charlie Morgan. Nora eut beau lui assurer que tout était pour le mieux, qu’il ne fallait pas y faire attention, elle ne pouvait s’empêcher de le trouver bizarre. Elles reprirent le chemin conduisant aux sombres bâtiments de Sainte Clothilde. Nora, qui n’avait pas la langue dans sa poche, avait entrepris de lui raconter son histoire. Elle était la fille d’un gros éleveur de bétail texan dont les parents étaient venus d’Angleterre cinquante ans plus tôt. Son grand-père avait combattu les mexicains pour l’indépendance du Texas, un de ses oncles était mort vingt ans auparavant à Alamo. Ses parents habitaient près d’Austin et elle avait trois frères et une sœur. Mais elle était sûre qu’un jour, c’est elle qui gérerait le domaine et les troupeaux. Elle avait ça dans le sang.
"Et toi ? Comment vois-tu ton avenir ?
– Noir", répondit Fanny d’une voix sombre.
Elle accéléra le pas, laissant la texane méditer sur sa réponse.

Le temps que Nora reprenne ses esprits et décide quoi faire, Fanny était déjà remontée dans sa chambre, avait sorti une nouvelle feuille et mordillait son porte-plume avec ardeur. La feuille blanche rendue la veille à la place de la rédaction sur la modiste lui avait valu un nouveau devoir tout aussi intéressant. Nora apparut dans l’encadrement de la porte. Elle était rouge d’avoir couru. Des petits cheveux roux s’échappaient de sa coiffure d’habitude impeccable. Son visage était devenu sévère. « Il faut qu’on parle », dit-elle simplement.

Elle jeta un coup d’œil à la compagne de chambre de Fanny qui venait d’entrer et arborait un sourire des plus intéressé. Son expression de fouine agaça Nora. "Laisse-nous, Constance, continua-t-elle à son intention.
– Tu te fais des illusions, Eleonora Fallbright. Je tiens trop à savoir ce que vous mijotez.
– Dehors, Parker, siffla Nora en la toisant du haut de son mètre soixante-dix. Sinon il pourrait t’arriver des choses horribles… Et on risque de ne pas reconnaître ton corps... Si on le retrouve un jour."
Constance lui lança un regard noir mais ne se le fit pas dire deux fois. Nora ferma la porte et tira le verrou. Puis, les mains sur les hanches, elle se planta devant Fanny qui n’avait pas bougé d’un cil. Il ne lui fallut pas longtemps pour s’adoucir. Elle lui prit la main et la fit asseoir sur le lit. "Tout ce que je veux, c'est t’aider, Fanny. Je le vois, que tu ne vas pas bien, que tu n’es pas heureuse.
– Et toi, tu es heureuse, ici ?
– Je préférerais être chez moi, bien sûr. Mais ce n’est pas le cas. Il faut bien se faire une raison. Heureusement, j’ai les garçons. Ils sont formidables, tu sais.
– Tu les as. Tu n’as pas besoin de moi.
– Mais toi, tu as besoin de moi. Je te l’ai dit, je veux t’aider.
– Pourquoi tu fais tout ça ? Je ne suis rien pour toi.
– Tu me fais penser à moi lorsque je suis arrivée. Si tu veux survivre ici, il faut te plier aux règles, Fanny. Il faut t’adapter.
– Jamais.
– Pourquoi tu t’obstines ? ... Je sais que tu n’aimes pas cet endroit. Mais, je suis sûre que tes parents ont cru bien faire, qu’ils t’aiment. S’ils t’ont mise ici, c’est probablement parce qu’ils voulaient ce qu’il y a de mieux pour toi.
– Mes parents ne voulaient pas ça ! s’emporta Fanny. Oui, ils m’aiment. Mais lui, non ! Je suis rien pour lui. Il y a un an, il ne voulait même pas savoir que j’existais.
– De qui parles-tu ?
– De ce vieux tyran qui dit être mon grand-père. Celui qui m’a mise ici sans se demander de quoi j’avais besoin. J’ai besoin d’air, Nora. J’ai besoin d’espace. J’ai besoin de respirer. J’étouffe, ici. Tu comprends ? J’ai l’impression de mourir, entre ces murs. Comme s’ils allaient s’écrouler sur moi et m’ensevelir."
Incrédule, stupéfaite, Nora la vit tomber à genoux, les mains en avant, la tête pendante, le souffle court. Elle s’agenouilla devant elle et lui prit la main. Elle avait les muscles tétanisés. Forçant ses défenses, Nora la prit dans ses bras. Mais Fanny ne pleura pas. Elle ne savait pas pleurer.

Quand elle ouvrit les yeux, il lui fallut quelques minutes pour s’habituer à l’obscurité. Un visage dissimulé sous le capuchon d’une pèlerine était penché sur elle. La capuche se rabattit, révélant la figure ronde de Nora, un doigt sur les lèvres. La jeune fille lui fit signe de se lever et de s’habiller, puis elle glissa un polochon à sa place et remonta les couvertures. Une fois la porte de la chambre refermée, Nora lui prit la main et elles se glissèrent sans bruit le long des murs jusqu’à l’escalier, traversèrent le hall et atteignirent le parc. "Où va-t-on ? demanda Fanny, en relevant le col de sa pèlerine.
– On a rendez-vous.
– En pleine nuit ?
– Bien sûr, c’est plus amusant, comme ça."
Elles s’engagèrent dans l’allée centrale, puis la texane obliqua à droite, vers l’écurie. Elle contourna le bâtiment de briques et frappa deux coups à la porte du local où les palefreniers rangeaient la paille et les aliments des six chevaux du collège. La porte s’entrouvrit, révélant la frimousse d’Henry Morgan. Les deux autres étaient assis sur des ballots de paille, autour d’une lanterne. Nora dégrafa le haut de sa pèlerine et en sortit, triomphante, une bouteille de bourbon. "Tu as été piquer dans la réserve personnelle de Hillman ? demanda Charles en examinant la bouteille en connaisseur.
– Ca ne peut être que bénéfique à la santé de Madame la directrice", répondit la jeune fille en riant.
Charles déboucha la bouteille et allait la passer à William quand il se ravisa. Il la mit sous le nez de Fanny. "Bois, et tu seras vraiment des nôtres."
La fillette écarta la bouteille du dos de la main. "Ça m’est égal, d’être des vôtres ou pas. Je ne boirai pas.
– Voilà une gamine qui sait ce qu’elle veut, dit Charles en riant. A ta santé, Poison."
Il but une bonne gorgée et passa la bouteille à William qui fit de même. Puis, il monta sur un ballot de paille et, d’un geste pompeux, déclara ouverte l’assemblée secrète du Club des Exilés.
En réalité, tout ceci n’avait rien de bien extraordinaire. Assis dans la paille, les jeunes gens devaient raconter à tour de rôle une aventure ou un événement amusant qu’ils avaient vécu où qu’on leur avait raconté. Le principal était que cela ait eu lieu à l’Ouest du Mississippi et accessoirement, que ce fut vrai. Mais personne n’était en réalité très à cheval sur la véracité du récit car Fanny s’aperçut vite que William Lance était un expert de l’embellissement des histoires banales. Les autres, s’ils s’en rendaient compte, ne semblaient pas s’en préoccuper, bien trop absorbés par les récits farfelus où le jeune homme se mettait allègrement en scène et qu’il agrémentait de mimes et d’imitations. L’air de rien, il déclenchait à coup sûr de véritables fou-rires. Mais le plus important était que ces histoires leur permettaient de rêver. En fermant les yeux, Fanny s’imaginait très bien les magnifiques paysages et les scènes que décrivait William avec tant de brio : le désert que balayaient les vents, soulevant des nuées de poussière à travers lesquelles filtraient les rayons du soleil, accentuant ainsi la lumière rougeoyante du crépuscule. Le canyon aux parois abruptes qui résonnait des cris des voyageurs suivant d’un pas hésitant le lit asséché d’un ancien ruisseau. Elle les connaissait ces paysages. Elles les avait elle-même contemplés. Il y avait aussi le troupeau gigantesque d’où s’élevait inlassablement une cacophonie de beuglements, tandis que les hommes à cheval le poussaient vers la rivière. La masse compacte des bêtes à cornes lançant un pont entre les deux rives, remuant et souillant les eaux tout à l’heure paisibles du Rio… Elle aurait presque pu s’endormir sur cette image, le sourire aux lèvres, puisqu’elle était là-bas avec eux. Elle aussi avait de quoi les faire rêver. Fort Laramie était encore tellement présent dans sa mémoire. Elle s’était fait un délice de leur décrire la grande chasse d’été à laquelle elle avait assisté avec les cheyennes : les collines noires de milliers de bisons avançant paisiblement vers la North Platte. Un gigantesque troupeau piétinant les hautes herbes aussi loin que le regard pouvait porter. Elle avait bien vu ses nouveaux compagnons froncer les sourcils à l’évocation des indiens, mais le récit de la chasse et le frisson qu’elle y avait fait passer avaient rapidement effacé leurs réticences. Le vent de l’aventure les grisait autant que le bourbon de madame Hillman.
Le temps que chacun raconte son histoire, la bouteille était passée plusieurs fois de main en main. Harry Morgan avait bien tenté d’en avaler une gorgée, mais la quinte de toux qui l’avait pris avait fait sourire son frère qui lui avait retiré la bouteille des mains en lui rappelant qu’il n’était pas encore tout à fait un homme. A la fin de la réunion, Charlie reboucha le précieux trésor et alla le dissimuler sous des ballots de paille qui n’avaient pas dû bouger de là depuis plus d’un an. Le froid glacial de la nuit les surprit dès qu’ils mirent le nez dehors. Voilà qui changeait de la remise que réchauffaient les bêtes de l’écurie mitoyenne. Tandis que Charlie refermait la porte, William ramassa une poignée de neige et, après l’avoir soigneusement façonnée, la lança vers Nora. La jeune fille eut à peine le temps de détourner la tête. Le projectile s’écrasa à la base de son cou, laissant quelques particules de neige glisser à l’intérieur de son manteau. Nora se mit alors en devoir de venger l’affront et ramassa à son tour des munitions, aussitôt imitée par Harry. Cinq minutes plus tard, la bataille était générale. Cheveux et habits couverts de neige, les jeunes gens se démenaient en étouffant difficilement leurs rires pour éviter les petits bolides blancs qui arrivaient maintenant de tous côtés et riposter au mieux. Chacun pour soi et Dieu pour tous, il n’y avait ni camps ni alliances. C’était à celui qui resterait debout le dernier.

Quand elles arrivèrent en vue du dortoir, Fanny et Nora s’arrêtèrent, essoufflées. Elles se regardèrent et firent un effort remarquable pour ne pas éclater de rire. Elles étaient rouges d’avoir couru et heureuses d’avoir enfin pu libérer leur trop-plein d’énergie. Fanny ne s’était pas sentie aussi bien depuis longtemps. Pour la première fois depuis son arrivée à Boston, elle avait l’impression que le ciel s’éclaircissait au-dessus de sa tête.

Les sabots des chevaux attelés en paire résonnaient en cadence sur le pavé, accompagnés par le bruit sourd des roues. Le soleil brillait, en cette froide après-midi, mais ne suffisait pas à réchauffer l’atmosphère glaciale. Essuyant de temps à autre la buée qui se formait sur la vitre au rythme de sa respiration, Fanny regardait défiler les maisons rouges de Beacon Hill. C’était étrange, comme le ciel bleu et la blancheur immaculée de la neige amoncelée le long des trottoirs, dans les jardins nus, sur les arbres, sur les toits et les balcons, comme tout ça pouvait transformer la ville, l’illuminer. Pour un peu, elle se serait presque sentie heureuse. Elle se renfonça sur la banquette du fiacre et regarda le vieil homme assis face à elle, les mains croisées sur le pommeau de sa canne. Il avait fait un effort. C’était le moment de tenir la promesse faite au colonel.
"Grand-Père ?"
L’avocat sembla émerger d’une profonde réflexion. Il posa sur elle ses yeux froids, l’invitant ainsi à parler. "Grand-Père, je suis contente que nous passions les fêtes de Noël ensemble. Ce sera l’occasion de mieux nous connaître."
Le vieil homme ne répondit pas et, tournant la tête vers la vitre, retomba dans ses pensées. Déçue, Fanny baissa les yeux.

Madame Pembleton apparut sur le perron dès que la voiture s’arrêta devant la grille. Elle s’effaça devant eux pour les laisser entrer, prit le manteau de son maître qu’elle déposa dans les bras d’une servante puis, comme il disparaissait dans son bureau, entreprit de dévêtir la fillette. "Vous avez une mine excellente, Mademoiselle... Suivez-moi, j’ai fait préparer du feu dans votre chambre. Vous avez reçu un colis du Nouveau Mexique."
Le visage de la fillette s’illumina. Elle voulut se précipiter dans sa chambre, mais la gouvernante l’arrêta d’un geste autoritaire. "Un peu de tenue, je vous prie. On ne vous apprend donc pas les bonnes manières au collège ?
– Si, mais mon professeur dit que je ne suis pas douée pour cette matière.
– Voilà qui ne m’étonne guère. Allons, mademoiselle Fanny. Un peu de patience."
La vieille femme monta lentement les escaliers et poussa la porte. Une douce chaleur et une odeur de braises leur parvinrent aussitôt. Fanny entra dans la lumière chaude émanant de l’âtre où brûlait un feu tranquille. Comme à chaque fois qu’elle entrait dans cette pièce, son regard se posa furtivement sur le portrait de Maxime en uniforme de cadet de West Point. Elle avait été frappée, la première fois qu’elle avait vu ce portrait, par la douceur de ses traits presque féminins. C’était la première fois qu’elle voyait son père, bien qu’elle ait souvent essayé de l’imaginer. Elle l’avait contemplé longtemps, essayant de se retrouver dans son visage. Elle en avait conclu qu’elle devait finalement beaucoup plus ressembler à sa mère. D’ailleurs, elle avait hérité d’elle son teint hâlé et ses yeux en amande. Cela lui avait permis de mieux se la représenter elle aussi.
Un paquet de papier brun était posé sur le bureau. Elle interrogea du regard la gouvernante qui lui sourit. Contrôlant son impatience, Fanny s’assit à la table et déballa le paquet avec application. Elle poussa soudain une exclamation admirative. Au milieu du papier froissé, il y avait un petit coffret de bois sculpté. Sur le couvercle, un médaillon représentait une tête de cheval. Et ce cheval, à n’en pas douter, c’était Black Storm. C’étaient ses yeux un peu fous, sa crinière épaisse et ses petites oreilles veloutées pointant l’une vers l’autre. Le bas du médaillon portait la signature de l’artiste : "MD". Mike Davis. Elle souleva délicatement le couvercle. Le coffret contenait deux paires de gants. L’une en laine grise avec trois perles indiennes aux poignets, bien chaude pour les longs hivers ; l’autre en fine peau retournée qui avait dû demander un long et fastidieux travail à sa mère. Ils valaient de loin les gants de Constance Parker. En dessous, elle découvrit une petite broche argentée en forme de trèfle à quatre feuilles. Ce bon vieux Kirby n’était pas irlandais pour rien. Il avait beau se proclamer américain avant tout, la terre d’Irlande lui collerait toujours aux bottes. Au fond de la boîte, il y avait encore quelque chose : un petit étui de velours rouge dans lequel elle découvrit un harmonica chromé étincelant. Celui que lui avait promis son père deux ans auparavant. Elle le saisit délicatement et le porta à ses lèvres pour en sortir une note aigrelette. Elle sourit en reposant l’instrument dans son écrin. Ce serait un beau Noël... "Madame Pembleton, j’aimerais aller en ville.
– Je ne sais pas si Monsieur l’autorisera.
– Je sais, mais j’aimerais lui acheter un cadeau. Pour lui aussi, ce doit être Noël. "
Agathe Pembleton réfléchit un instant. Elle ne pouvait pas demander la permission. Cela gâcherait la surprise. "Mettez vos jolis gants, finit-elle par dire, et rejoignez-moi dans le hall. Je vais m’assurer que Monsieur est toujours dans son bureau."

Fanny descendit en silence les escaliers et enfila à la hâte son manteau pendant que la gouvernante nouait le ruban de son bonnet. Après un signe de connivence, elles refermèrent doucement la porte derrière elles. Agathe Pembleton leva la main pour arrêter un fiacre, mais Fanny la retint. "Allons à pieds, proposa-t-elle. C’est si agréable de marcher enfin."
La vieille femme ne discuta pas, lui prit la main et traversa la rue pour descendre vers Common Park. Elle n’en revenait pas de voir la transformation qui s’opérait de minute en minute chez l’enfant. Celle-ci lui avait vite échappé et courait en avant, tournant sur elle-même, riant aux éclats, les bras levés vers le ciel d’un bleu cristallin. Elle s’arrêtait devant chaque jardin où émergeait un buisson, regardait avec adoration les chevaux des fiacres, respirait à pleins poumons l’air glacé.
Elles rentrèrent à la tombée du soir, épuisées, transies, mais Fanny rayonnait. Elle avait trouvé le cadeau parfait, s’était attardée dans le parc, avait mangé des marrons grillés et même fait du patin avec d’autres enfants sur la mare gelée. Ce soir-là, elle s’endormit en souriant, avec le sentiment qu’elle pourrait finir par aimer Boston si on la laissait la découvrir à sa guise.

Ils étaient assis chacun à un bout de la table, silencieux. Simon Lanxford avait prit place entre eux. Le potage fumait dans les assiettes, mais Fanny n’y avait pas touché. Elle levait de temps en temps les yeux vers le vieil homme dans l’espoir qu’il surprendrait son regard et engagerait la conversation. Puis elle regardait l’homme de confiance qui avalait gloutonnement le contenu de son assiette. Quand le vieil homme parlait, c’est à lui qu’il s’adressait. Il parlait de ses affaires. Lanxford reposa son couvert et aperçut la mine sombre de la fillette. "Vous ne mangez pas, Mademoiselle ? C’est pourtant excellent.
– Je... Je n’ai pas très faim.
– Mangez, Fanny, ordonna l’avocat.
– Grand-Père... Est-ce que nous irons à la messe de minuit ?
– Madame Pembleton vous y accompagnera.
– Mais, je pensais...
– Cessez de penser, petite sotte. Apprenez plutôt les bonnes manières. Maintenant, taisez-vous et mangez.
– Je vous en prie, Grand-P…
– Ça suffit ! s’emporta Barthelemy. Je n’ai que faire de vos jérémiades. Et je vous ai déjà dit de ne parler que lorsqu’on vous le demande !"
Fanny se leva, furieuse. "Comme de toute façon, vous ne me le demandez jamais, je ne vois pas quand je pourrais vous ennuyer. Autant être muette ! Ça vous arrangerait, n’est-ce pas ?
– Petite insolente ! Je vous le dis pour la dernière fois. Asseyez-vous et mangez !
– Pourquoi faire ? Que je mange ou que je crève de faim, peu vous importe. Je n’existe pas, pour vous. Je me demande pourquoi vous avez pris la peine de venir me chercher. Vous me détestez autant que je vous hais. De toute façon, vous n’aimez personne. Vous êtes un gros avocat égoïste qui ne sait que compter ses millions. J’espère que vous vous étoufferez avec !"
La tirade suffoqua le vieil homme qui ne sut quoi répondre. Profitant de sa surprise, Fanny s’avança vers lui, les yeux étincelants de colère, et posa devant lui le paquet qu’elle avait soigneusement dissimulé dans un repli de son jupon. "Joyeux Noël", dit-elle, avec un regard impitoyable, avant de courir s’enfermer dans sa chambre.
Barthelemy regarda, incrédule, le petit paquet. Il était pâle comme la mort. "C’est une blague à tabac", dit une voix, dans son dos. Madame Pembleton avait suivi toute la scène depuis le pas de la porte. Barthelemy fut surpris par son expression affligée. "Elle se faisait une joie de vous l’offrir. Et vous, vous n’avez même pas songé à lui faire un présent.
– Cette petite ingrate ne manque de rien, que je sache.
– Non, de rien... Excepté d’amour.
– Agathe, je vous rappelle que vous n’êtes qu’une employée, ici. Retournez à vos casseroles et ne vous mêlez pas de cette affaire."
Le vieil avocat se leva, prit son manteau et héla une voiture.

Fanny ne le revit pas pendant plusieurs jours. Il avait donné l’ordre de la garder enfermée dans sa chambre jusqu’à son retour au collège. Madame Pembleton la réveillait à sept heures, la faisait habiller, puis menait l’étude. Elle repartait sans avoir prononcé un mot de plus que nécessaire, la laissant avec un monceau de travail. Deux fois par jour, la cuisinière lui portait un plateau avec de la soupe, du pain et de l’eau. C’étaient là son seul régime et ses seules visites. Pourtant, dès qu’elle avait tourné la clé dans la serrure et remis le trousseau dans sa poche, Agathe Pembleton s’arrêtait sur le palier, regardait mélancoliquement la porte et poussait un soupir. Le sermon du maître le soir de Noël ainsi qu’une sévère mise en garde avaient joué leur rôle. Elle ne pouvait plus se mettre du côté de l’enfant, malgré son cœur déchiré. Elle servait Edward Barthelemy depuis si longtemps qu’elle ne pouvait pas se dresser contre lui. D’ailleurs, elle se rendait compte combien elle-même avait changé. Elle s’était adoucie, au contact de cette petite révoltée. Elle était en train d’oublier ce qu’on lui avait enseigné, cette froide indifférence et cette sévérité qui faisaient d’elle une bonne gouvernante. Il était temps de se reprendre. De par son nom, la jeune fille était destinée à évoluer dans les plus hautes sphères de la société. Il fallait l’y préparer. Et pour cela, il fallait dompter son caractère rebelle et la plier aux usages. Agathe Pembleton avait donc retrouvé son masque austère et ses manières rigides.

Un soir, au moment du coucher, Barthelemy entra à la place de la vieille femme. Fanny finissait un chapitre d’un roman de Dickens. Il semblait très calme, mais le frémissement de sa moustache laissait deviner la colère qui couvait. "Lanxford vous reconduira demain matin à Sainte Clothilde. J’espère que ces quelques jours vous auront permis de réfléchir sur votre conduite inexcusable et que dorénavant, vous saurez vous tenir convenablement et faire honneur au nom que vous avez la chance de porter."
La fillette lui rendit, pour toute réponse, un regard lourd de haine et se replongea dans son livre. Le vieil homme ne le remarqua pas. Satisfait de ne trouver aucune résistance, il sortit et la serrure cliqueta. Elle entendit ses pas décroître lentement dans l’escalier, quelques mots échangés avec le maître d'hôtel, puis la porte de l’entrée se refermant. Il devait aller à son club, comme tous les soirs. Comme le soir de Noël. Quelle importance ? Bientôt, elle raconterait tout ça à Nora. Elle lui dirait qu’elle avait failli aimer Boston et elles en riraient ensemble. Nora savait rire. Elle lui réapprendrait.

"Eleonora ? Elle ne fait plus partie des pensionnaires du collège."
Le sourire méchant de Constance lui transperça le cœur. Il s’était passé quelque chose d’inhabituel, et probablement au détriment de Nora. Voilà ce que disait ce sourire. "On l’a renvoyée la semaine dernière, en même temps que ce vaurien de Charles Morgan, continua Annie Drumming, la doublure de Constance. Voilà ce qui arrive, quand on côtoie n’importe qui.
– Cette traînée n’a que ce qu’elle mérite. Dommage que tu n’aies pas été là. C’était fort divertissant."
Les deux jeunes filles éclatèrent de rire. Fanny leur aurait volontiers sauté à la gorge, mais elles n’attendaient que l’occasion de la faire renvoyer elle aussi. Renvoyée, ça signifiait retourner dans la sinistre maison du vieux Bart, au pain et à l’eau, avant d’intégrer un autre collège où la situation serait de toute façon la même. Quant à Nora, elle saurait ce qui s’était vraiment passé. Elle savait où chercher.

Lorsqu’elle fut sûre que Constance dormait profondément, elle se leva et fabriqua un leurre avec ses oreillers, comme elle le faisait à chaque fois qu’elle allait à une réunion du club. Elle sortit sur la pointe des pieds, ses bottines à la main, descendit dans le hall et poussa lentement la lourde porte de chêne donnant sur le parc. Elle enfila ses chaussures, remonta son capuchon et se faufila dehors, une ombre furtive dans la nuit, tel un fantôme hantant les vieilles bâtisses de pierre. Elle gagna rapidement la statue, puis obliqua à gauche, vers les bâtiments du collège des garçons. Le ciel était clair et la neige rendait la nuit lumineuse. Mais les arbres effleurant le dortoir lui offraient un abri suffisant. Elle avisa la fenêtre de Charlie et William, au deuxième étage, balaya la neige pour trouver un gravier et visa la vitre. Il ne s’agissait pas de manquer son tir et aller frapper à côté ou en dessous. Son expérience de la fronde se révélait fort utile, dans ces cas-là. D’ailleurs, c’était elle qui avait visé, les deux fois où Nora et elle étaient venues. Le petit caillou cogna le carreau en plein centre. Elle attendit quelques secondes puis recommença l’opération. Pas de doute, pensa-t-elle. Je suis plutôt adroite pour ce genre de sport. Une lueur vacillante apparut. Fanny lança un troisième gravier qui toucha au but. Le panneau inférieur de la fenêtre se souleva et la tête ébouriffée de William apparut.
"Willy, c’est moi.
– Tu es complètement folle de venir ici ! chuchota le jeune homme, soudain parfaitement réveillé.
– Il faut que je te parle, dit Fanny, sans tenir compte de sa réflexion. J’arrive."
William la regarda s’accrocher aux branches basses, incapable de rien dire. Il était visiblement paniqué. Il jetait d’incessants regards aux alentours, puis à sa chambre. Avec l’agilité d’un petit singe, Fanny avait déjà atteint la branche côtoyant la fenêtre. William alla tirer le verrou et revint pour l’aider à passer le rebord de la fenêtre. "Pourquoi tu es venue ? C’est dangereux, tu n’aurais pas dû.
– Qu’est-ce qui s’est passé, Willy ?
– Pourquoi tu n’as pas attendu dimanche ? On aurait pu se parler sans risque.
– T’es qu’un trouillard, William Lance. Dis-moi ce que je veux savoir et je m’en irai.
– Le surveillant les a surpris dans la remise.
– Nora et Charlie ?
– Il ne m’avait pas dit qu’ils avaient rendez-vous. Mais c’était pas la première fois. C’était sûr qu’ils finiraient par se faire pincer."
En une fraction de seconde, Fanny revit les quelques journées passées avec la texane, son sourire chaleureux, son espièglerie, son aplomb devant les surveillantes. Elles avaient eu si peu de temps pour se connaître. Elle en savait encore moins de Charlie : quatre réunions, une bataille de boules de neige... C’était peu pour apprécier quelqu’un, pour se permettre de porter un jugement. Elle ne se trouvait pas le droit de lui en vouloir. "Constance m’a dit qu’ils ont été renvoyés.
– Tu penses ! Ça a fait un de ces scandales. Ils ont prit le bateau pour le Texas il y a deux jours. Depuis, Harry et moi, nous sommes sous surveillance. Je suis sûr que toi aussi. C’est pour ça que tu n’aurais pas dû venir.
– Et le Club ?
– Le Club n’existe plus. Rentre le plus vite possible, Fanny. S’ils t’attrapent...
– Pour m’attraper, il faudra qu’ils courent très vite."
La fillette lui adressa un sourire complice, enjamba la fenêtre et se retrouva à califourchon sur sa branche. En un rien de temps, elle regagna le tronc puis le sol. Willy la regarda disparaître sous l’ombre des grands arbres et retourna se coucher.

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