Le Poney Express


Chapitre 6

Pendant ce temps, le reste de l’équipe terminait leurs courses à Sweetwater. Teaspoon était venu voir ce qui avait fait fuir les deux indiens. Il se doutait de la raison, mais il voulait en avoir la confirmation. Il ne reprocha pas l’attitude de monsieur Tompkins ouvertement, mais il ne l’approuva pas. Cependant, il espérait que ce dernier n’avait pas blessé la nouvelle recrue. Mag, pour sa part, ne s’inquiétait pas pour son amie. Elle savait que P.V. était assez forte et assez fière de ses origines pour prendre sur elle et ne pas s’offusquer des propos du magasinier. Celui-ci, par contre, semblait plutôt gêné. Il n’avait pas repris la parole depuis le départ de la jeune femme. Une fois les provisions achetées et chargées dans le chariot, la petite équipe regagna tranquillement le relais. Teaspoon ne les accompagna pas. Sa journée était loin d’être finie. Durant le trajet, Rachel ne put s’empêcher de critiquer l’attitude de Monsieur Tompkins. Elle désapprouvait totalement le comportement qu’avait eu le propriétaire du magasin. Elle était d’accord pour admettre qu’il avait probablement ses raisons de réagir ainsi, mais elle pensait qu’il aurait tout de même pu se montrer un peu plus poli en essayant d’accepter P.V.. Elle était assez énervée. Mag tenta de la calmer en lui disant que même si elle était partie, son amie ne tiendrait probablement rigueur à personne de ce qui c’était passé. Elle n’aimait guère les villes et en général elle s’arrangeait pour éviter d’y aller. Cela ne la dérangerait pas. Jimmy qui écoutait grommela alors :
" Cela ne va donc pas être évident de livrer le courrier !
- P.V. sait se tenir ! Et quand elle devra aller en ville, elle ira sans rechigner. C’est aussi vrai que si elle peut éviter de s’y rendre, elle le fera. Mais rassure-toi, elle ne te posera aucun problème là-dessus ! Lui répondit Mag prête à défendre son amie.
- Elle a tout intérêt ! " lui répondit le cow-boy un peu sévèrement.

Mag ne répondit rien à sa remarque. Elle était sûre que P.V. s’en sortirait bien. La jeune indienne ne montrait pas facilement ses sentiments. Elle les gardait précieusement au fond d’elle. Mag était donc certaine que Jimmy ne se rendrait compte de rien.

Ils arrivèrent rapidement au relais. Noah était devant la porte. Il exprima sa surprise de ne pas voir P.V. avec eux. Rachel fut alors catastrophée d’apprendre que la jeune femme n’était pas rentrée. Mag expliqua brièvement au jeune homme ce qui s’était passé en ville. Noah ne fut nullement surpris par la réaction du propriétaire du magasin. Lui-même avait eu des problèmes en arrivant en ville. Il était noir et Monsieur Tompkins avait énormément de préjugés contre les gens de couleur. Mais cela s’était tassé plutôt rapidement. Cependant, il avait une haine de indiens telle que Buck avait toujours eu des ennuis avec lui. En parlant de lui, Rachel se rendit compte qu’il n’était également pas rentré. Ike attira alors l’attention du groupe et leur annonça que Buck et P.V. devaient probablement être allés visiter le coin. Tout le monde fut d’accord et personne ne s’inquiéta d’avantage. Les garçons se mirent donc en devoir de décharger la carriole pour Rachel, pendant que la jeune femme s’occupait de ranger les provisions achetées. Cody venait de porter la dernière caisse dans la maison de leur cuisinière lorsque P.V. et Buck rentrèrent de leur promenade. L’équipe les regarda arriver. Les deux indiens avançaient tranquillement vers eux. Dès qu’il furent assez près, Mag les accueillit en demandant à son amie :
" Alors tu as visité le coin ? Comment le trouves-tu ? "

Mag remarqua facilement que son amie avait l’air plutôt ravie de sa ballade. Cette dernière se laissa glisser au bas de son cheval tout en lui répondant :
" Plutôt agréable ! Certains endroits me rappelle mes collines. Et je suis sûre qu’il y a pas mal de lapins dans le coin ! "

La jeune femme comprit immédiatement l’allusion de son amie. La présence de lapins dans les forêts avoisinantes signifiait qu’elle allait pouvoir chasser de temps en temps. Mag savait que c’était une occupation que P.V. adorait. Elle en avait été longtemps privée juste après le massacre de sa tribu. Mag pensait donc que si l’indienne parvenait à aller chasser, elle s’habituerait plus facilement au coin. Mag désigna alors Chasseur de la tête et demanda à son amie :
" Et lui, tu crois qu’il s’habituera à la région ? "

P.V. suivit le signe de tête de Mag et ses yeux se posèrent sur son compagnon à fourrure. Celui-ci s’était tranquillement couché à ses pieds. L’indienne garda le silence quelques instants tout en observant Chasseur. Puis, finalement, la jeune femme hocha la tête tout en répondant :
" Oui, je pense qu’il aimera le coin ! "

Mag sourit intérieurement. La réponse de son amie la soulageait un peu. Elle pensait que si Chasseur s’adaptait à la région, alors P.V. parviendrait à s’acclimater plus facilement. Le loup étant un des derniers liens qui la raccrochait à sa tribu, l’indienne n’aurait jamais pu envisager de s’en séparer ou de vivre loin de lui.

Buck attacha alors son cheval devant le dortoir et toute l’équipe s’installa sur les marches ou autour pour discuter. Ike avait fait une petite place à P.V. sur les escaliers et d’un geste l’invita à venir s’assoir avec eux. P.V. ne pouvait refuser, aussi elle plaça ses rennes correctement sur l’encolure d’Esprit Sauvage et lui donna une petite tape sur l’arrière train. Le cheval s’éloigna aussitôt. L’indienne le regarda se diriger vers la grange près de laquelle il s’installa tranquillement. Il était au calme et avait sa liberté de mouvement, elle pensa donc qu’il serait bien. Puis, l’indienne vint s’assoir sur les marches aux côtés de Ike. Le petit groupe se mit alors à discuter. Les garçons voulaient en savoir plus sur les deux jeunes femmes qui allaient partager leur vie. Mag leur révéla qu’elle avait été élevée par son père et ses frères car elle avait perdu sa mère très jeune. Avant la mort de cette dernière, elle savait déjà monter à cheval, car c’était un animal que sa mère adorait. Et c’était avec ses frères qu’elle avait appris à tirer au revolver. Elle aimait bien parler de sa famille. Tous lui manquaient beaucoup, mais ils n’étaient pas très loin, elle espérait donc pouvoir aller les voir de temps en temps. Elle évoqua aussi les convois de chevaux et de vaches auxquels elle avait souvent participé avec son père et ses frères. Cependant, la jeune femme leur cacha que son père était le propriétaire des animaux qu’ils convoyaient. Elle craignait un peu que cela ne suscite de la convoitise et de la jalousie. Et puis, ce n’était pas dans ses habitudes d’exposer aux yeux de tous, l’aisance dans laquelle elle avait vécu toute son enfance. P.V., pour sa part, ne parla pas beaucoup. Elle préférait éviter d’évoquer le massacre de sa tribu. Ce drame était encore trop frais dans sa mémoire et elle parvenait difficilement à maîtriser ses sentiments lorsqu’elle y pensait. Par chance, ce soir-là, personne ne lui demanda ce qui avait pu la pousser à prendre la route avec Mag.

Puis, la discussion s’orienta vers d’autres sujets. P.V. fut alors rapidement perdue, mais elle continuait de les écouter. De temps en temps, Ike lui posait une question à laquelle elle répondait par geste, de sorte qu’à part Buck qui les observait personne ne remarqua rien. L’indien nota que les signes employés par la jeune femme différaient légèrement de ceux qu’il avait appris. Mais, ni Ike, ni elle ne semblait s’en rendre compte. L’un comme l’autre s’adaptait et ils avaient l’air de se comprendre malgré tout. Buck ne put s’empêcher de penser que si une certaine complicité naissait en eux, il deviendrait pratiquement impossible de les comprendre lorsqu’ils discuteraient ensemble. Cependant, l’indien garda pour lui ses remarques. Il pensa que c’était une bonne chose pour son ami. Le handicap du jeune homme le mettait souvent un peu à l’écart des autres. Buck espérait sincèrement que l’arrivée de P.V. atténuerait cet écart. L’après midi touchait à sa fin, P.V. s’excusa auprès de Ike avant de se lever. Elle entra d’abord dans le dortoir pour chercher sa brosse. Celle qui lui servait pour s’occuper de son cheval. En ressortant, elle aperçut que la conversation s’était tue et que tous la regardaient. Elle esquissa un sourire gêné et déclara :
" Je vais m’occuper d’Esprit Sauvage ! "

Elle descendit les quelques marches et se dirigea, sans un mot de plus, vers son cheval. L’équipe la regarda faire. Elle attrapa les rennes de son coursier et l’entraîna à l’intérieur de la grange. Chasseur était sur ses talons, il ne semblait pas vouloir rester seul avec tous ces étrangers. Le silence s’était abattu sur le groupe et c’est Lou qui finit par le rompre en demandant à Mag :
" Elle brosse son cheval tous les soirs ?
- Oui, lui répondit Mag. C’est une des traditions de sa tribu. En se rattachant à ces coutumes, elle se sent moins seule et plus proche d’elle. Et puis, elle adore ses animaux. "

Lou hocha la tête et Cody posa une nouvelle question sans rapport cette fois avec la jeune indienne. La conversation reprit donc de plus belle. Pendant ce temps, dans la grange, P.V. avait ôté sa selle du dos de son compagnon et s’était mise à le brosser. Tout en accomplissant ce rituel quotidien, elle commentait sa journée à ses compagnons. Elle était plutôt contente dans l’ensemble. La jeune femme était placée de telle sorte qu’elle ne pouvait pas voir l’entrée de la grange. Cependant, elle ne fut pas surprise par l’appariation près d’elle de Teaspoon. Même si elle était plongée dans sa discussion avec ses compagnons, elle n’avait pas manqué de remarquer l’attitude de son loup. Celui-ci était couché en face du box dans lequel Esprit Sauvage était installé. Positionné ainsi, il avait une vue à la fois sur sa maîtresse, mais aussi sur l'entrée de la grange. Le prédateur avait donc senti la présence de Teaspoon dès son arrivée. Aussitôt ses oreilles s’étaient tournées dans sa direction. Rapidement, l’une d'elles était revenue écouter ce que disait sa maîtresse, mais l’autre resta tournée vers le nouveau venu. Le marshal avait lui aussi aperçu le bref mouvement de l’animal. Mais, il s’était dit que s’il devait apprendre à vivre avec le loup, il ne fallait pas lui montrer la crainte qu’il leur inspirait. Gardant tout de même ses précautions, il s’approcha de l’indienne comme il en avait l’intention dès le début. Chasseur ne bougea pas jusqu’à ce qu’il juge l’homme trop près de lui. Là, il se leva et alla se recoucher dans le box près de sa maîtresse. Teaspoon fut légèrement surpris par le mouvement du loup, mais il ne montra rien. P.V. s’était tu mais elle n’avait pas arrêté de brosser son compagnon. Le marshal la regarda faire quelques instants. Il voulait lui parler seule. L’histoire avec Monsieur Tompkins l’ennuyait un peu et souhaitait savoir comment l’indienne comptait réagir. Il tenta donc de lui exprimer ses questions. La jeune femme l’écouta sans dire un mot. Puis, lorsque qu’il eut fini, elle lui répondit avec simplicité et gentillesse :
" Si Monsieur Tompkins a une mauvaise opinion de moi parce que je suis indienne, il a sûrement ses raisons. Si ma présence l'incommode, j'éviterai de le mettre dans l'embarras en allant le moins souvent possible dans son magasin. Ca ne me dérange pas.
- Tu es sûre que cela ne te posera pas de problème ? demanda le marshal.
- Oui, cela ira. Je me débrouillerai !
- Il finira par vous accepter. Déclara Teaspoon, mais il lui faut un peu de temps. Sa famille a été massacrée par des Sioux, et il a du mal à pardonner. Mais, ce n’est pas un méchant homme ! "

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