Le Poney Express

Chapitre 7

P.V. hocha la tête silencieusement. Elle comprenait son amertume. Elle-même éprouvait la même envers les soldats de l’armée. Elle savait donc combien c’était dur de pardonner un tel acte. Le marshal garda le silence quelques instants et observa l’indienne démêler délicatement la queue de son cheval. Finalement, il finit par rouvrir la conversation.
" Tu n’as pas faim, toi ? Parce que moi, je meurs de faim ! "

La jeune femme venait de terminer de s’occuper de son compagnon. Elle se retourna vers le marshal et hocha la tête. Sans un mot, elle déposa la brosse qu’elle tenait en main dans un coin du box, s’assurant que personne ne risquerait de marcher dessus puis elle suivit Teaspoon. En sortant de la grange, P.V. se rendit compte que le reste de l’équipe était toujours assis sur les marches du dortoir. Teaspoon les rejoignit. P.V. l’accompagna. Ils discutèrent quelques instants puis, le marshal leur proposa d’aller se restaurer. Tous se levèrent et gagnèrent la maison de Rachel qui devait certainement avoir déjà dû tout préparé. L’indienne fermait la marche. En jetant un coup d’oeil en direction de la grange, elle remarqua que Chasseur se faufilait vers l’enclos. Avant de disparaître au coin de celui-ci, l’animal s’arrêta et tourna la tête en direction de sa maîtresse. Il huma l’air afin de s’assurer que la jeune femme ne risquait rien. Puis, il s’éloigna dans la pénombre. C’était son heure de liberté. P.V. le regarda partir sans rien dire avant de suivre les autres. Aucun d’eux n’avait remarqué le départ de son compagnon.

Ils pénétrèrent dans la maison et s’installèrent autour de la table. Ils venaient de commencer à manger lorsque Teaspoon déclara :
" Jimmy, toi et P.V., vous irez à RockCreek demain ! "

Le cow-boy faillit s’étrangler avec ce qu’il était en train d’avaler. Dès qu’il eut repris son souffle, il s’écria :
" Ce n’est pas mon itinéraire habituel !
- Je sais ! poursuivit le marshal sans faire attention au ton courroucé du jeune homme. Mais, c’est le premier voyage de P.V., aussi je ne veux pas qu’elle parte pour un long courrier tout de suite. C’est pourquoi vous irez à RockCreek.
- J’assurerai mon relais habituel ? demanda alors Buck.
- Oui, lui répondit Teaspoon, pour toi pas de problème vous rentrez dans la journée. "

Le marshal se remit à manger pensant que la question était close, mais Jimmy n’était pas de cet avis. Il essaya à nouveau d’exprimer son mécontentement et demanda calmement essayant ainsi de coincer le marshal de façon à ce que celui-ci revienne sur sa décision :
" Et qui assurera mon long courrier ?
- Noah s’en sortira très bien. " Lui répondit le marshal en enfournant un nouvelle bouchée de son ragoût.

Jimmy comprit alors qu’il ne ferait pas changer le marshal d’avis. Il continua néanmoins de bougonner, mais dès lors ce fut incompréhensible. Le repas se termina tranquillement. A la fin du repas, Rachel commença à ranger. Elle rassembla les restes de son ragoût dans une assiette et empila les autres près de son évier. Mais avant de se mettre à laver la vaisselle, elle sortit avec l’assiette contenant les restes. L’équipe discutait tranquillement malgré tout ils remarquèrent la sortie discrète de Rachel. Celle-ci revint quelques instants après. Cody lui demanda alors ce qu’elle avait été faire, mais la jeune femme ne lui répondit pas. Elle regarda P.V. et la questionna :
" Sais-tu où est ton loup ? "

L’indienne leva la tête et la regarda. Elle ne comprenait pas pourquoi Rachel cherchait son compagnon. Puis, elle aperçut l’assiette que le jeune femme tenait toujours en main. Aussitôt, elle comprit. Elle répondit donc le plus simplement du monde.
" Il est parti chasser ! "

Teaspoon s’arrêta brutalement au beau milieu de la phrase qu’il était en train de prononcer en réponse à une question de Noah. Il posa les yeux sur l’indienne qui se tenait toute discrète en bout de table. Même s’il n’en avait pas eu l’air, il avait écouté la question de Rachel et la réponse de la jeune femme ne lui avait pas échappé. Le silence se fit brutalement dans la pièce. P.V. comprit immédiatement que c’était sa réponse qui avait amené cette brusque interruption des conversations. Tout le monde avait maintenant les yeux braqués sur elle, et la jeune femme en devient nerveuse. Le marshal fut le premier à parler et lui demanda :
" Tu dis qu’il est parti chasser. En es-tu sûre ?
- Il faut bien qu’il se nourrisse ! " lui répondit P.V. avec sa simplicité habituelle.

Elle savait pourquoi ils avaient l’air de tous s’inquiéter. Ils avaient encore peur du loup. Elle le comprenait fort bien, même si elle était sûre au fond d’elle-même qu’il n’y avait rien à craindre. Cependant, devant les regards braqués sur elle et le silence qui s’était de nouveau abattu autour de la table, elle se sentit obligée de poursuivre.
" Je sais qu’il y a des troupeaux dans le coin, mais il ne faut pas vous faire de soucis à leur sujet. Chasseur ne s’en prendra pas à eux !
- Tu es sûre ? " lâcha Lou plus rapidement que les autres.

P.V. posa son regard sur le jeune homme. Celui-ci la regardait assez sévèrement. L’indienne le fixa quelques instants essayant de comprendre le sentiment qui l’envahissait chaque fois qu’elle était en confrontation avec lui. Puis, se rendant compte que tout le monde attendait sa réponse, elle déclara :
" Oui ! Lorsqu’un troupeau est attaqué par des loups, cela veut dire qu’ils étaient nombreux et affamés. C’est une entreprise dangereuse pour eux. Un coup de sabot peut tuer un loup. Chasseur est un animal solitaire et il est loin d’être affamé. S’il n’attrape rien, il me le dira. Mais je sais qu’il ne risquera pas sa vie derrière un gros animal. Les lapins lui conviennent mieux ! "

L’indienne tentait de rassurer l’équipe assise autour de la table, mais chaque fois qu’elle croisait le regard sévère de Lou, elle était envahie par ce même sentiment qu’elle ne parvenait pas identifier. Aussitôt, elle devenait nerveuse et ne savait quoi dire pour défendre son compagnon à fourrure. Puis, son regard se posa sur Mag. Celle-ci comprit tout de suite le désarrois de son amie et vint à son aide.
" P.V. a bien éduqué son loup. Donnez-leur la chance de vous le prouver ! "

P.V. fut soulagée du soutient que lui apportait son amie. Elle lui adressa un sourire auquel Mag répondit facilement. Buck demanda alors à Rachel.
" Pourquoi cherchais-tu le loup de P.V. ? "
Rachel lui répondit :
" J’avais des restes que je pensais lui donner à manger, mais vu qu’il chasse, il n’en a pas besoin ! "

Elle avait l’air déçue et s’apprêta à jeter ce qu’elle avait collecté pour le loup. P.V. sentit sa déception et lui dit :
« Tu peux toujours essayer de les lui donner. Il ne les mangera peut-être pas. Mais si tu sais te montrer patiente, il finira par accepter tes restes. Et puis, même s’il chasse, il n’attrape pas toujours quelque chose à manger...
- Tu penses qu’il les mangera ? Demanda Rachel le ton un peu plus enjoué.
- Il faut essayer, lui répondit P.V. conciliante. Mais, il va avoir besoin de temps pour s’habituer à vous, comme vous en avez besoin pour accepter sa présence... "

Rachel lui sourit et décida de se montrer patiente envers l’animal. Aussi, elle ressortit pour poser l’assiette au coin de la grange. Elle espérait que le loup finisse par y toucher. Mais elle ne s’attarda pas dehors. Elle devait encore ranger sa cuisine. Lorsqu’elle rentra, elle trouva Noah aidé de Mag qui lavaient déjà la vaisselle. Les autres continuaient tranquillement leur conversation interrompue avant sa question. Elle constata que P.V. était de nouveau silencieuse comme si elle avait un quota de mots à prononcer dans une journée et qu’elle l’avait atteint. Elle ne remarqua pas que si l’indienne ne se mêlait pas de la conversation parlée, elle n’hésitait cependant pas à répondre à Ike. Une fois la cuisine rangée, Teaspoon prit congé d’eux et ils gagnèrent tous le dortoir. Comme la veille, la couverture fut installée afin que les deux jeunes femmes passent derrière pour se changer. Dès que tous furent prêts, ils se couchèrent et la lumière fut éteinte. Allongée dans le noir, Mag fit un bilan de la journée. Dans l’ensemble, celle-ci s’était plutôt bien passée. P.V. semblait être plus ouverte qu’à l’accoutumée. Elle semblait répondre relativement facilement aux questions que lui posaient les garçons. Mag avait surpris de temps en temps quelques gestes que son amie faisait à l’intention de Ike. Elle espérait donc que l’indienne s’adapterait facilement au groupe. Elle souhaitait tellement que son amie retrouve un foyer et arrive à soulager la peine contenue dans son coeur. Tout était silencieux dans le dortoir. La lune brillait derrière les carreaux. Mag se retourna dans son lit et finit par s’endormir sur ces espoirs.

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