La dame de pique


Chapitre 4 (suite)

Toujours allongée sur le sol de la maison de Liam Nielson, Mary Jane ouvrit les yeux et aperçut Cody, assis près d’elle. Ses yeux clairs s’illuminèrent en voyant la jeune femme reprendre conscience.
-Bien... marmonna alors Nielson en s’approchant d’eux, je crois que nous avons un problème... Clint ! rajouta-t-il en s’adressant au cow-boy, enlève leur ces bâillons, nous allons discuter entre gens civilisés.... L’homme s’exécuta rapidement sans lâcher son arme.
-Vous êtes un traître Nielson ! s’écria Cody une fois libéré. Nous savons que vous vendez des informations militaires !
-Ah c’est donc ça ! répondit l’homme en riant, je me demandais bien ce qui pouvait vous intéresser ici !
-Vous êtes foutu, l’armée sera bientôt là pour vous arrêter ! renchérit Cody sûr de lui.
-Vraiment ? Mais qui donc les préviendra ? Vous ? Nielson se mit à rire bruyamment Demain vous ne serez malheureusement plus là pour le faire continua-t-il, ni vous, ni cette charmante demoiselle, parce que je vous aurai descendu, surpris en flagrant délit de cambriolage... Nielson prit une mine triste avant de continuer, ironique. Quel dommage, ce cher Clint et moi nous allons devoir vous tuer, en toute légitime défense...
Ses mots glacèrent le sang de Mary Jane. Pour la première fois elle était confrontée à la mort et pire encore, elle entraînait avec elle William. Aucune solution ne lui venait à l’esprit, trop occupée à se demander pourquoi elle avait raté son coup. Comment avait-elle pu rater son coup ? ! Et que faisait Teaspoon ? Avec cette lumière dans le hall, il aurait dû se douter que quelque chose se tramait ! Avait-il eu des problèmes ? Peut-être était-il en train de monter un plan pour les tirer, Cody et elle de ce mauvais pas ! Il fallait gagner du temps, coûte que coûte ! En une fraction de seconde, ses yeux se posèrent sur un tableau qui ornait le mur de Nielson, elle le connaissait...
-Nielson, faisons un marché ! lança-t-elle soudain.
Le type la regarda, interloqué, Cody resta sans voix, ne sachant pas où voulait en venir la jeune femme.
-Mary Jane ! lui murmura-t-il.
-Tais-toi Cody, laisse moi faire ! raillât-elle sèchement sans le regarder. Je crois pouvoir dire sans me tromper que vous aimez les objets d’art n’est ce pas ? J’ai vu toutes les pièces que vous avez dans votre bureau... et tous ses tableaux...continua-t-elle tout en essayant de s’asseoir.
Nielson et son homme de main l’écoutaient attentivement, impatients de connaître sa proposition.
-J’ai le tableau du Musée de Boston, vous savez, celui dont vous avez une copie juste là, accrochée au mur, continua-t-elle sûre de l’effet de surprise qu’elle provoquerait.
Nielson posa les yeux sur le tableau en question, l’air plus grave. Cody n’avait pas dit mot, il faisait confiance à la jeune femme qui semblait maintenant bien plus à l’aise, en tout cas bien plus que Nielson ne l’était à cet instant ! Ce dernier fronça les sourcils et s’approcha d’elle, posant son arme sur son visage.
-Je ne vous crois pas dit-il simplement, comment pourriez-vous avoir ce tableau ? Il a été volé au Musée de Boston...
-Je sais oui, coupa la jeune femme sans brocher, c’est moi qui l’ai volé. Puis, le plus naturellement du monde, elle sourit et ajouta, fière : "je suis la dame de Pique".
Les yeux plantés dans ceux de la jeune femme, Nielson semblait la sonder. Elle ne se déroba pas à son regard inquisiteur et, approchant son visage encore plus près du sien, un sourire narquois aux lèvres, lui répondit :
-Fichez-nous la paix et je vous donne ce tableau, il vaut des milliers de Dollars... Mais ça vous devez le savoir non ? Et avant de pouvoir vous le payer, il faudra que vous vendiez non plus de petits secrets militaires minables comme vous le faites si bien en vous camouflant derrière une pauvre fille sans cervelle, mais les confessions les plus intimes du Président Lincoln lui-même !
-Qui me prouve que vous avez ce tableau ? se contenta de répondre Nielson, quelque peu vexé par le culot de la jeune femme.
-Je vous le dis, c’est tout. A vous de voir.
-Ce serait vous le fameux voleur alors ? reprit-il, le doute dans la voix.

Nielson réfléchissait. Il avait rangé son arme, ses yeux brillaient d’excitation. Mary Jane avait gagné. Malgré le fait qu’elle ait dû se vendre et dévoiler son secret, cela avait au moins permis de gagner quelques précieuses minutes. Cette histoire de tableau n’était que poudre aux yeux bien sûr, l’armée lui avait confisqué tous ses trésors... Mais qu’importe. Nielson semblait y croire.
Un sourire aux lèvres, il arpentait le hall de long en large, tandis que Clint pointait toujours son colt sur Mary Jane et Cody, l’air quelque peu étonné par l’attitude tourmentée et indécise de son patron.
-Qu’est ce qu’on fait ? demanda-t-il alors.
-Laisse-moi donc réfléchir Clint... répondit Nielson en se frottant le menton.
Mary Jane avait touché son point faible ; cet homme était avide d’argent et de pouvoir, comment refuser autant d’argent si vite gagné ? Il semblait conquis par l’offre de la jeune femme, bien que doutant de sa bonne foi.
-Je ne vous crois pas Mademoiselle... lança-t-il finalement, ébranlant tout à coup la confiance que Mary Jane avait retrouvée tantôt. Votre ami semblait bien sûr de lui tout à l’heure lorsqu’il a dit que l’armée allait venir me prendre, je suppose donc que c’est l’Union qui vous envoie n’est ce pas ? On vous a mandaté pour venir récupérer ces documents, vous êtes donc des agents à la solde de l’union... et pas celle que vous voulez me faire croire ! Il se mit à rire, posant les mains sur ses hanches. Vous n’êtes pas la Dame de Pique, vous n’avez pas ce tableau, tout n’est que mensonge ! Vous bluffez ! lança-t-il excédé.
-C’est la pure vérité Nielson, j’ai été piquée à Boston, et le Colonel Grant a passé un marché avec moi, ma liberté partielle contre vos documents ! grogna Mary Jane, vexée.
-Ben voyons ! reprit Nielson, vous, ce fameux voleur recherché dans tout l’Est du pays vous vous seriez rabaissé à un tel marché ? Devenir le patin d’un colonel ?! Non, je n’y crois pas une seconde...
-J’aurais fait n’importe quoi pour rester libre... insista Mary Jane.
-On ne se refait pas jeune fille... On ne devient pas honnête du jour au lendemain ! Et les types qui vous ont arrêté le savent, quand on est de la mauvaise graine, on reste de la mauvaise graine ! lança froidement Nielson, essayant de la déstabiliser. Je ne crois pas qu’ils aient été assez bêtes pour prendre le risque que vous leur échappiez...
-C’est pourtant ce qu’ils ont fait ! railla la jeune femme.
-Et bien si c’est le cas, Grant vous utilise, et il vous collera en prison après ça, et vous aurez tout perdu. Parce que s’il vient me chercher moi, il vous emmènera aussi. Soyez en sûre !

Mary Jane ne savait plus quoi penser. Nieslon avait peut être raison après tout... Cet excès de confiance de la part de Grant était, il est vrai, étonnant, mais il lui avait bien expliqué lors de leur entretient qu’il n’avait pas le choix, et Lincoln avait insisté, et puis, surtout, Mary Jane avait cru comprendre qu’il avait besoin de ses services de cambrioleur hors pair... ! Quelle naïveté ! Au plus elle repensait à cet entrevue avec Grant, au plus elle se disait qu’il s’était certainement joué d’elle et que ses intentions étaient de la jeter en prison après qu’elle lui ait rendu service. Après tout, pourquoi se soucierait-il d’elle ? Pourquoi tiendrait-il parole ? Elle l’avait pourtant cru ce jour là, entourée de Teaspoon et Cody... Peut-être avait-elle eu envie d’y croire, aveuglée et déroutée par les sentiments qu’avaient éveillé en elle ce beau et bavard jeune homme. Comment, elle d’habitude si rationnelle, avait-elle pu se laisser emporter de la sorte, par de telles futilités alors que son avenir était en jeu ? La prison aurait peut-être été plus sage, dans la suite des choses... Et en plus, ni William, ni aucun de ses amis n’aurait été mis en danger.

Cody avait remarqué le doute s‘inscrire sur le visage de la jeune fille, Nielson avait réussi à retourner la situation à son avantage. Mary Jane était perdue, ébranlée par ses déductions implacables.
William tenta alors de détourner son attention de Nielson, car à cet instant, face à cet homme manipulateur et dominateur, elle était une proie facile et influençable.
-Ne l’écoute pas Mary Jane ! grogna Cody tout en se débattant. Ne l’écoute pas ! tu as fait le bon choix ! s’écria-t-il, essayant de défaire ses liens.
L’homme de main de Nielson le fit taire, en lui assénant un coup de pied dans le ventre. William se recroquevilla sur lui-même en grimaçant.

Jimmy et Noah étaient postés derrière la porte vitrée, l’arme au poing, prêts à tirer, attendant un signe quelconque venant de l’intérieur. Le silence commençait à peser et Jimmy ne tenait plus en place.
-Bon Dieu ! Que fait Teaspoon ! lança-t-il.
-On devrait peut-être y aller... proposa alors Noah, tout aussi impatient.

Pendant ce temps, à l’intérieur, Nielson avait rengainé son arme et s’était assis sur un petit fauteuil de velours foncé, les bras croisés, il regardait Mary Jane en souriant, ravi du trouble qu’il avait semé.
-Allons Mlle Cooper, reprit-il plus détendu que jamais, pourquoi ne pas travailler avec moi ? Nous ferions de bonnes affaires et vous éviteriez la prison... c’est ce que vous vouliez non ? éviter la prison ?
-Allez au diable Nielson ! répliqua-t-elle en le fusillant du regard.
-Très bien... Je vais donc devoir vous descendre...continua-t-il en se levant, prêt à sortir son colt à nouveau, mais puisque vous êtes ce voleur, personne ne m’en tiendrait rigueur ! railla-t-il ironique.
-Moi je vous en tiendrai rigueur Nielson ! cria une voix en haut des marches.
-Teaspoon ! murmura Cody dans un soupir.

Surpris, le dénommé Clint se tourna rapidement et tira. Un second coup de feu retentit le blessant à l’épaule.
Alertés, Noah et Jimmy entrèrent brusquement dans le hall de l’hôtel, tirant à leur tour sur Nielson et son complice, qui après ce deuxième impact, s’effondra devant Cody.
Profitant de la panique qui s’était installée, Nielson s’enfuit dans la pièce juxtaposée poursuivi par Jimmy, Buck et Kid sur ses talons. Noah se chargeât de l’homme de main, resté à terre, mais toujours conscient.
-T’es cuit beau blond ! lança-t-il ironique, bouge surtout pas !
-Vous en avez mis du temps ! dit Cody, alors que Teaspoon se chargeait de défaire ses liens.
-Tu mériterais qu’on te laisse là ! rétorqua Noah dépité.

Les deux otages furent bientôt libérés, et se levèrent enfin, au moment où Kid, Buck et Jimmy arrivèrent. Hickok tenait Nielson par le bras. Il le jeta sans ménagement vers Teaspoon.
-Il a pas pu aller bien loin ! dit-il ce faisant.
-Est-ce que tout va bien ? demanda alors Lou qui avait rejoint la petite équipe, alertée par les coups de feu.
-Oui, ça va mieux maintenant ! répondit Mary Jane un large sourire aux lèvres.
Nielson ne se débattit pas, il se contenta de regarder la jeune fille, des éclairs de rage dans les yeux.
-J’ai beaucoup d’amis Mlle Cooper... marmonna-t-il, et je ne resterai pas assez longtemps en prison pour vous oublier ! Je vous retrouverai !
-L’espoir fait vivre Mr Nielson répondit Mary Jane, mais cette fois c’est moi qui gagne !
-Vous n’êtes qu’une... !! commença-t-il excédé par son comportement hautain.
-Je vous conseille de vous taire Monsieur Nielson coupa Cody en l’attrapant par le col de sa veste, on ne parle pas comme ça à une dame...
Forte de sa victoire et fière d’avoir pu se sortir de ce mauvais pas avec l’aide de tous, Mary Jane s’approcha alors de Nielson toujours aux prises avec Cody, et ne put s’empêcher de le narguer de nouveau. La jeune femme posa ses yeux dans les siens et murmura les dents serrées :
-Vous n’êtes rien Nielson, vous me dégouttez ! Sale traître ! Vous méritez de crever !
Surpris par les propos ainsi tenus par la jeune femme, Noah et Kid s’empressèrent de conduire les deux hommes à l’office du Marshall, arrachant Nielson aux mains de Cody et au regard glacial de Mary Jane.
-Avez-vous trouvé ce que vous cherchiez ? demanda alors Hunter à la jeune femme qui était maintenant calmée et remise de ses émotions.
-Oui Marshall, j’ai trouvé.
Hunter sourit, les mains sur les hanches, plutôt fier d’avoir pu aider la demoiselle à mener à bien sa mission. -Qu’est-ce que vous croyez Teaspoon, continua Cody tout en passant un bras autour des épaules de la jeune fille, vous avez devant vous le plus grand cambrioleur de l’Est du pays !
-Sauf que cette fois ci, tout a failli rater ! railla-t-elle. Heureusement que vous étiez tous là ! Je vous dois une fière chandelle !
-Il y a une entrée camouflée à l’extérieur de l’hôtel, c’est par là qu’ils sont passés, ajouta Hunter.
-Comment as-tu pu oublier ça dans tes notes ? fit alors remarquer Hickok en se moquant.
-Je devais avoir la tête ailleurs... se contenta de répondre Mary Jane en jetant un regard amusé vers Cody.
-Ah ! L’amour ! lança alors Hunter en soupirant longuement... sortons d’ici maintenant !

Le temps que Mary Jane retourne à l’étage récupérer la fameuse pochette, toute la petite équipe se retrouva au bureau du Marshall, enfin soulagé d’en avoir terminé avec cette mission... Il ne restait plus qu’à prévenir Grant, Teaspoon s’en chargerait le lendemain.

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